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Sortie du DVD de Notre Monde

Notre Monde Notre Monde (2013, 119') un film de Thomas Lacoste
Rassemblant plus de 35 intervenants, philosophes, sociologues, économistes, magistrats, médecins, universitaires et écrivains, Notre Monde propose un espace d’expression pour travailler, comme nous y enjoint Jean–Luc Nancy à « une pensée commune ». Plus encore qu’un libre espace de parole, Notre Monde s’appuie sur un ensemble foisonnant de propositions concrètes pour agir comme un rappel essentiel, individuel et collectif : « faites de la politique » et de préférence autrement.
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© Passant n°38 [janvier 2002 - février 2002]
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Regard d’après


La lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil

René Char





Passant inquiet

Ville illusoire

Regard fixe

Marche linéaire

Succession d’images

Vingt quatre rétines par secondes

Distorsions cristallines

Nuages

Véhicules d’un imaginaire

Apparitions fantomatiques

Images fixes, permanentes

Pesanteur des lieux, épaisseur des rues

Air bleu

Texture du vide

Omniprésence du silence

Progression hors du sens

Images imposées

Poitrine, cœur

Battements arrêtés

Comprendre

Pas un bruit pour éclairer

Des yeux

Paupières aveugles

Impressions blanches

Nausée des images

Mémoires mécaniques

Vient la peur

Les habitants ne sont plus

Images mortes

Ville indécente

Citoyens du néant

Cité suicidée

Perte du regard

Plus de vie dans ses rues

Sa peau morte à l’instant

« Le peuple du 17 avril » a disparu

Maisons désertes

Portes, poitrines, fenêtres, orbites offertes

Incarnations de l’horreur

Phnom Penh, année 75, « Année Zéro »

Le passant s’éloigne

Chœung Ek, 15 kilomètres sud-ouest

Ses yeux s’ouvrent

Un champ de solitude

Vaches de passage, arbres figés

Vent inexistant

Silence posé sans demeure

Prudence des pas

Marche sur des cris

Marche sur des morts

Ils sont là mais n’habitent plus

Ils le dévisagent

Crânes aux regards fixes

Orbites minérales cherchant des yeux

Pagode de verre et d’ossements

Stupa du souvenir

Vêtements morcelés qui n’habillent plus

Souvenirs de vies fracassées

Bruits de crosses

Vacarmes des résistances brisées

Pas de détonations

Les balles s’achètent, le sang se donne

Cassures, fractures

Marques d’une morte violence

Manque le hurlement des os

Compagnon du silence quand un crâne éclate

L’infini du moment

L’infini d’un charnier béant

Lourdeur du ciel, moiteur de l’air

La pluie ne vient pas

Larmes sans visage

Regards dans le vide laissé par un génocide

Tout autour la mort

Promenade achevée sur cette terre cimetière

Pas métalliques

Quête de sens

Le départ

De la douleur dans ses cheveux

De la pluie dans son regard

Sang humide

Mémoire chaude

Orage tropical

Ciel ouvert

Devenir bleu

Lumière d’après la pluie

De la nuit jaillissent les fantômes

Dans l’éveil de nos consciences.


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